Anna O. La première patiente de la psychanalyse entre mythes et réalités.

Anna O., de son vrai nom Bertha Pappenheim, était une jeune fille de 21 ans lorsque qu’elle fut prise comme patiente par Josef Breuer, ami et collaborateur de Sigmund Freud. Son histoire est relatée par Freud et Breuer dans les Études sur l’hystérie (1895), ouvrage fondateur de la psychanalyse.

Bertha Pappenheim à 22 ans en 1882

Atteinte de divers symptômes comme une paralysie de certains membres, contractures, quintes de toux, hallucinations et diverses névralgies, Bertha Pappenheim est prise en traitement par Josef Breuer, qui utilise diverses méthodes et médicaments, et aussi l’hypnose alors en vogue pour le traitement des hystériques. Breuer observe que la patiente se porte mieux à chaque fois qu’elle a l’occasion de parler de sa maladie. À ce propos, Bertha Pappenheim perdit l’usage de sa langue natale, l’allemand, pour ne parler que l’anglais. Elle désigna sous le terme de « talking cure » les effets libérateurs de la parole, ce qui donne naissance à la méthode cathartique. La catharsis est le fait de pouvoir améliorer son état psychique en verbalisant ses affects. Freud utilise ensuite la méthode cathartique auprès de ses patients qui ne sont pas hypnotisables, avec un certain succès.

Le cas de Anna O. est décrit en détail dans les Études sur l’hystérie (1895). Bertha Pappenheim avait alors une personnalité qui se dédoublait en fonction des moments de la journée, avec une amélioration notable de son état le soir. Après son traitement par Josef Breuer, Bertha Pappenheim put retrouver une vie normale. C’est en se remémorant d’anciens traumatismes qu’elle put guérir, ce qui conduisit Freud et Breuer à dire que « ce dont souffrent surtout les hystériques, c’est de réminiscences« . Suite à sa guérison, elle s’engagea dans de nombreuses causes sociales et humanitaires. Elle fut directrice d’un orphelinat juif à Francfort, elle défendit la cause des femmes en créant la « Ligue des femmes juives ».

Anna O. est devenue au fil de l’histoire un véritable cas princeps de la psychanalyse, ce que Freud rappelle dans sa première des « Cinq leçons sur la psychanalyse » attribuant humblement à Breuer la paternité de la psychanalyse en 1909. C’est Ernest Jones, proche collaborateur et biographe de Freud qui révéla l’identité de Bertha Pappenheim, non sans enjoliver le récit du cas Anna O. Quoiqu’il en soit, Anna O. reste étroitement associée à la catharsis et inventa l’expression « cure de parole ». On peut relire l’histoire de sa maladie, avec les précautions qui s’imposent, dans les Études sur l’hystérie. Bertha Pappenheim est un cas typique de sublimation des pulsions libidinales : c’est par une activité socialement valorisée, la cause des femmes et des enfants, qu’elle pu améliorer son état psychique durablement tout en se soumettant à une stricte abstinence sexuelle tout au long de sa vie. En hommage à son travail, un timbre à son effigie fut même édité en Allemagne après la seconde guerre mondiale.

Bibliographie :

  • Études sur l’hystérie, Sigmund Freud et Josef Breuer, 1895
  • Dictionnaire de la psychanalyse, Elisabeth Roudinesco, 2023, pages 762 à 767
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